Le troisième volume de l’Instruction Chrestienne de 1564

vendredi, 30 mai 1997 20:25

   Pierre Viret avait projeté de compléter 1564 Instruction et 1564 Exposition par un troisième volume, dont le titre devait être : Declaration de la doctrine de la providence divine, touchant les biens et les maux qui adviennent ordinairement au monde, et la predestination des hommes ; et la manifestation de Dieu en l’œuvre de la redemption du genre humain, et par la revelation de l’Evangile, contenant les decrets et canons du second general Concile, auquel Dieu a presidé en forme humaine, en la personne de son Fils Jesus Christ, et par la presence visible de son S. Esprit (1564 Instruction, f. *1v.).

    Ce volume n’est probablement jamais paru sous la forme prévue lors de l’édition des deux premiers. Par contre, comme nous le verrons, Viret en a édité une partie sous une forme plus modeste.

    Par chance, au siècle passé, A.-L. Herminjard a relevé la dite note : « La reste va la querir vers le Roy de Nauarre qui a copie du troisiesme volume entre mains» (Papiers Herminjard, n° 511. Il est fait mention de Henri IV, qui a été roi de Navarre dès 1572, puis roi de France de 1589 à 1610. La note, si elle était authentique, aurait daté de la période entre 1572 et 1589, voire 1593 où Henri IV a abjuré définitivement le protestantisme. Notons que Viret vers la fin de sa vie a probablement été précepteur d’Henri IV).

    Si cette note était de la même main que celles que nous rencontrons tout au long de l’exemplaire d’Yverdon -- ce qui serait confirmé par l’orthographe employée -- elle aurait effectivement été de la fin du XVIe  siècle. S’agissait-il d’un collègue informé de Viret ou n’était-ce qu’une supposition de cet inconnu ? Nous ne le savons pas.

    Quant à la localisation du document en Navarre, la chose est plausible.

    Notons d’abord que l’épître introductive de 1564 Instruction est datée de Lyon, le 7 décembre 1563 (f. *8v). Puis que le deuxième volume, 1564 Exposition, date de Lyon, le 12 décembre 1563 (f. ¶8v).

    Or suite au conflit l’opposant à Emond Auger, Viret a dû fuir de Lyon vers la fin de l’année 1563, pour finalement chercher protection auprès de Jeanne d’Albret, Reine de Navarre, en Béarn.

    Les derniers ouvrages imprimés connus de Viret datent de 1565. Dès lors, pour différentes raisons, il n’y aura probablement plus de nouvelles oeuvres imprimées de Viret.

    Nous n’avons pas retrouvé ce 3e volume tel quel. Toutefois, un rapprochement doit être fait avec 1565 De la Providence, dont le contenu aurait pu faire partie du 3e volume.

    Dans l’épître introductive de cet ouvrage, Viret nous dit ceci : « Combien que j’aye escrit fort amplement au second volume de mon Instruction Chrestienne, de la providence divine...» (f. *2r), puis : « Et pour autant que la matiere que je deduy maintenant est de la suyte de celle de laquelle j’ay desja escrit au second volume de mon Instruction Chrestienne, comme j’en ay adverty au commencement: cela a aussi été en cause que je la traite par Dialogues, et que j’introduy parlant en iceux les mesmes personnages que j’ay desja introduits és Dialogues de ce second volume. Pour ceste raison, en la deduction de leurs propos, ils renvoyent souventesfois à plusieurs poincts, desquels ils ont desja disputé par ensemble : non pas en ces Dialogues, mais és autres, lesquels ceux-cy doyvent suyvre par ordre » (f. *8v). Malheureusement cette épître adressée aux lyonnais n’est pas datée. Il est possible que l’ouvrage soit de la période béarnaise. Quoi qu’il en soit, ceci semble démontrer que le 3e volume n’est pas paru durant la période lyonnaise et qu’il ne paraîtra peut-être jamais.

    Notons encore que 1565 De la providence est une réédition du texte de 1559 Familiere. Seul le début de 1565 De la providence est nouveau, le reste suit assez fidèlement 1559 Familiere.

    En conclusion, nous pensons que, pris dans les polémiques lyonnaises, Viret n’aura probablement pas eu le temps de mettre en forme son troisième volume et se contentera de rééditer 1559 Familiere en l’augmentant légèrement.

    Quant à la note perdue de l’exemplaire de la BP d’Yverdon, il est possible que son auteur ait entendu parler de 1565 De la providence, n’ayant lui-même jamais eu cet ouvrage entre les mains. Ce livre est par ailleurs fort rare, puisque nous n’en connaissons à ce jour que 3 exemplaires qui se trouvent tous en Grande-Bretagne.